Etat de la population d'anguille européenne

Le stock d’anguilles est en déclin, en Bretagne comme ailleurs

Le déclin continu des arrivées de civelles depuis 1980 place aujourd'hui l'espèce à un niveau critique. De multiples pressions s'exercent sur l'anguille : pêche à tous les stades, construction de barrages, pollution, assèchement des marais et zones humides, introduction de parasites...

Les débarquements à l’échelle européenne et les indices d’abondance au stade civelle indiquent un déclin continu de l’espèce, dont les niveaux d’abondance se situent à un niveau critique.

Classement UICN de l'anguille européenne

Échelle de classement des espèces (UICN)

Renouvellement des générations : capital pour la survie d'une espèce

La reproduction de l'anguille européenne n'a encore jamais été observée. Il n'existe donc pas d'autre moyen pour connaître la réussite de la reproduction que de suivre le recrutement. C'est-à-dire d'estimer la quantité de civelles qui arrivent dans les estuaires. Le suivi du recrutement est donc le principal indicateur du renouvellement des générations.

Tendance du recrutement des séries européennes depuis 1900.

La bande grise donne les valeurs extrêmes pour les séries européennes de recrutement de civelles et d’anguilles jaunes couvrant plus de 45 années. Chaque série a été réduite sur sa moyenne 1979-1994. Les données sont rapportées à l’aide d’une échelle logarithmique sur l’axe Y (ce qui a tendance à aplatir la courbe ; la chute est en réalité beaucoup plus importante). Les moyennes et les intervalles de confiance à 95% sont représentés comme des points noirs entourés de barres verticales. La ligne marron représente la moyenne des anguilles jaunes, la ligne bleue représente la moyenne des séries de civelles.

 

De fortes pressions se sont exercées sur les milieux aquatiques dans le passé et continuent d'avoir des conséquences sur les espèces : dégradation des milieux aquatiques, construction de barrages, pollutions...

Notamment, le ver parasite nommé Anguillicoloides crassus - introduit en même temps que son hôte, l'anguille japonaise - détériore la vessie natatoire des anguilles, qui a un rôle de flottaison pour les poissons, et peut avoir, par conséquent, des effets sur le succès reproduction de l'Anguille. Une étude réalisée sur la Loire sur les anguilles argentées montre que plus de 67% des femelles sont parasitées par au moins un ver (Estimation du potentiel reproducteur en anguilles argentées de la Loire amont).
Il est difficile d'évaluer quantitativement l'impact de chacune de ces pressions sur les espèces. Leurs effets cumulés s'ajoutent aux autres pressions telles que la pêche à tous les stades, et aggravent la situation de l'espèce.

Une inconnue : la quantité de géniteurs qui partent en mer

Les anguilles argentées en âge de se reproduire s'échappent vers la mer tout au long de l'année. Les départs sont toutefois concentrés à l'automne lors des coups d'eau. Les anguilles économisent ainsi leur énergie pour la descente de la rivière et augmentent leur chance de survie avant d'arriver en mer.

Des calculs basés notamment sur les densités d'anguilles observées dans les cours d'eau lors de pêches à l'électricité sont utilisés pour prédire les quantités d'anguilles argentées. L'objectif du plan de gestion de l'anguille européenne est de laisser partir en mer 40% de la biomasse pristine.

Un système de comptage des anguilles argentées a été installé sur le barrage d'Arzal en 2012. Il devrait permettre une meilleure estimation de la production de géniteurs sur le bassin de la Vilaine.

Malgré tous ces efforts, il est impossible de savoir si les mesures prises seront suffisantes pour assurer la survie de l'espèce. En outre, on ne sait pas si l'objectif fixé dans le plan de gestion de l'anguille européenne (proportion de 40% des anguilles argentées qui partent en mer) permet d'assurer la survie de l'espèce. Une chose est sûre cependant : le nombre de jeunes continue de diminuer... et les prévisions ne sont guère optimistes.